Elle
s’appelait Sfiyya.[1]
Elle
a quitté l’existence ici-bas, il y a de cela un certain temps déjà.
Je
l’ai connue à Lkhmiçaate,[2] à mon
retour de France, après des études universitaires.
C’était
une « tyyaaba »,[3] une
femme à laquelle certaines familles font appel pour veiller sur tout ce qui est
culinaire, à l’occasion d’un mariage ou autres rassemblements où les convives
sont en grand nombre.
Une « chef
cuisinière ».
Cuisiner,
ce n’est pas seulement préparer des mets.
C’est
observer, réfléchir, se remémorer, cultiver des sensations, transmettre,
partager, offrir, témoigner sa reconnaissance au Seigneur des univers.[4]
Un
contact avec des êtres, des sons, des images, des couleurs, des parfums, des
goûts, et autres.
Un
parcours à travers le temps et l’espace.
Sfiyya
faisait partie de ces femmes qui savent ce que cuisiner veut dire, qui savent
mettre les saveurs de l’amour dans chaque plat, et sans lesquelles les
« recettes de cuisine » ne valent rien.
Elle
était originaire du Sud du Mghrib,[5] toujours
disposée à se déplacer lorsqu’il était fait appel à ses services.
Je
ne sais pas comment elle a rencontrée une de mes soeurs, ni comment elle a
décidé de rester avec elle, afin de s’occuper des travaux de la maison.
Elle
retournait de temps à autre au Sud pour rendre visite à quelques membres de sa
famille, mais pas souvent.
Elle
était veuve, et n’avait pas d’enfant.
Je
l’ai vu en rêve dernièrement.
Nous
étions dans une maison ancienne au Mghrib.
Il y
avait ma belle-mère[6]
et d’autres membres de la famille.
Nous
nous préparions pour je ne sais quel événement important, et elle s’activait
afin que les préparatifs se déroulent « comme il se doit ».
Son
teint noir donnait plus d’éclat à son foulard jaune tout neuf, qui couvrait
impeccablement ses cheveux.
Elle
m’annonçait que mon frère cadet[7] avait
fini de s’habiller, qu’il n’allait pas tarder à me rejoindre,[8] et elle
se désolait qu’il ne veuille pas des produits utilisables lors d’une occasion
comme celle-ci.[9]
J’ai
cherché à la rassurer en lui disant que le refus d’utiliser les produits était
sans importance.
Qu’Allaah
la couvre de Sa miséricorde, et nous rassemble au « Firdaws
ala’laa ».[10]
BOUAZZA
[1]
Safiyya, pure.
[2]
Khémisset, cité au Nord du Maroc.
[3]
Du verbe ʺtayyabaʺ, faire cuire.
Tayyaaba,, celle qui fait cuire.
[4]
Rabb al’aalamiine (le ʺrʺ roulé).
[5]
Maghrib (le ʺrʺ roulé), Maroc.
[6]
La troisième épouse de mon père.
[7]
De presque deux ans plus jeune que moi.
[8]
Je n’étais pas encore prêt.
[9]
Crème ou Parfum, ce n’était pas clair dans le rêve.
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