lundi 2 novembre 2020

CHACUN SON CHEMIN

 J’étais enfant, écolier au cours élémentaire première année.[1]
C’était en 1958,[2] à Rabat,[3] au quartier de l’Océan où nous habitions.
Le Maroc[4] venait de se voir octroyer ce qui est appelé « l’indépendance dans l’interdépendance ».[5]
J’avais huit ans.
L’école était proche de la maison.
Je m’y rendais seul, à pied, comme l’ensemble des écoliers.
Et personne ne nous attendait à la sortie pour nous ramener à la maison.[6]
L’enseignement se faisait en arabe classique,[7] et en français.
En français, l’institutrice était française.
Elle exigeait,[8] en vérifiant, que la plume de notre porte-plume soit changée au début de chaque semaine, afin d’éviter les taches que pouvait causer la plume de la semaine d’avant.[9]
Un jour du début de la semaine, en arrivant devant l’école, je m’étais rendu compte que j’avais oublié d’acheter une nouvelle plume.
Afin de ne pas subir une punition que j’estimais injuste, j’avais décidé de repartir, d’aller voir ailleurs, me promener à proximité de l’établissement, et de retourner à la maison à l’heure de la fin des cours, comme si de rien n’était.
L’école n’était pas loin d’une église dont la blancheur est toujours présente dans mes souvenirs.[10]
Je m’étais donc dirigé vers cet édifice, et tout en me promenant je m’arrêtais devant les boutiques pour regarder.
Et subitement,j’étais tombé nez à nez avec mon père :
- Qu’est-ce que tu fais ici ?
- Après l’école, c’est un chemin que je prends pour regagner la maison.
- C’est très tôt pour quitter l’école, tu n’as pas eu classe ?
- Non.
Mon père[11] a poursuivi son chemin, et moi le mien. [12] 
 
BOU’AZZA
[1] CE1.
[2] Selon le calendrier dit grégorien.
[3] Arribaate, Rrbaate (les ʺrʺ roulés).
[4] Almaghrib, Lmghrib (les ʺrʺ roulés).
[5] En 1956.
Statut octroyé par le système colonialo-impérialo-sioniste, et qui s’est traduit dans les colonies par la multiplication des "États" supplétifs, subordonnés avec plus ou moins de zèle, de soumission et de servilité dans l’exécution des ordres des métropoles et autres employeurs.
Ces "États" sont fondés sur l’imposture, le crime, la trahison, la tromperie, la corruption, l’injustice, la perversion, la débauche, le mensonge, le pillage, l’oppression, l’exploitation, le viol, la tyrannie, la torture, l’enfermement, la négation de l’être humain.
Au Maroc, occupé par la France, l’Espagne, et autres, occupation dite ″protectorat″, le système colonialo-impérialo-sioniste a transformé le sultanat moribond, en monarchie héréditaire, dite de "droit divin".
Le sultan, protégé, est alors devenu roi, au service de ce système.
[6] C’est en France que j’ai découvert que des parents accompagnaient les enfants à l’école, et venaient les attendre à la sortie.
[7] Qui n’est pas l’arabe parlé au Maroc : ddarija, darija (les ʺrʺ roulés), l’arabe dialectal.
[8] Sous peine de punition.
[9] Nous avions des tables avec des encriers.
[10] J’ai appris récemment que cette église était fréquentée surtout par les nombreux espagnols du quartier de l’Océan, a été, petit à petit abandonnée.
L’octroi de ʺl’indépendance dans l’interdépendanceʺ a entraîné un départ massif des espagnols, et l’église n’étant plus fréquentée, les autorités ecclésiastiques avaient décidé de la céder au gouvernement du Maroc.
Elle a été laissée à l’abandon jusqu’en 1987, date à laquelle il a été décidé d’entreprendre des travaux pour la transformer en ʺcentre culturelʺ.
L’église en arabe classique c’est alkaniiça.
En arabe parlé au Maroc, elle est appelée ʺjjaam’e dnçaaraaʺ (le ʺrʺ roulé), la mosquée des nazaréens (des chrétiens), lmrabbou (le ʺrʺ roulé), le marabout.
[11] L’existence ici-bas de mon père s’est achevée le samedi 4 octobre 2008, peu de temps après celle de ma mère qui date du samedi 28 juin de la même année.
[12] Voir :
http://raho.over-blog.com
http://paruredelapiete.blogspot.com
http://ici-bas-et-au-dela.blogspot.com
http://laroutedelafoi.blogspot.com
http://voyageur-autre.blogspot.com
http://lmslm.blogspot.com
http://iimaane.blogspot.com
http://deshommesetdesfemmes.blogspot.com


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