dimanche 27 novembre 2016

‘ABD ALHAFIIDE

Il s’appelait ‘Abd Alhafiid.
Le serviteur du Préservateur.[1]
Il était le deuxième fils des huit enfants[2] que mon père a eu avec sa troisième épouse.[3]
Il était marié, et père de deux filles.
C’est par ma soeur domiciliée à Ddaar[4] lbida,[5] que j’ai appris sa mort.
Il est décédé le vendredi 25 novembre 2016.[6]
Après avoir pris son déjeuner avec le frère de son épouse, celui-ci s’est absenté le temps de se laver les mains ; à son retour, il a trouvé mon frère allongé, en train de réciter achchahaada,[7] l’index levé.[8]
Et c’était ainsi qu’il avait rejoint l’au-delà.
L’enterrement a eu lieu le lendemain, à Lkhmiçaate.[9]
Ce frère avait cinq ans de moins que moi.
Flots de pensées.
Averses d’images.
Afflux de sensations.
Il n’avait pas encore quinze ans lorsque j’avais quitté le Maroc, pour des études universitaires en France.[10]
Et jusqu’au baccalauréat, j’avais passé de longues périodes à l’internat.
Je suis retourné au Maroc en 1977, mais nous n’avions pratiquement pas de contacts.
Depuis mon installation en France en 1981, je ne l’ai revu que les très rares fois où je me suis rendu là-bas.
C’est dire que lui aussi, je ne le connaissais pas bien.[11]
Lorsque j’étais adolescent, j’appréciais sa compagnie : il était vif, agréable, drôle, et avait de l’humour.[12]
Il avait mis au point à partir de l’arabe dialectal du Maroc, une sorte de parler que nous n’étions pas beaucoup à maîtriser dans la famille, et qui nous permettait de communiquer, en tenant à l’écart ceux et celles qui l’ignoraient.
Je n’ai jamais oublié ce parler qu’il m’a enseigné.
Que dire de ce qui s’en va et comment parler de ce qui demeure ?
Que dire de ce qui cesse et comment parler de ce qui commence ?
Que dire de ce qui a été et comment parler de ce qui sera ?
J’aimerais tant faire entendre le murmure de l’eau qui nous rappelle que « Nous sommes à Allaah et à Lui nous retournons ».[13]
  
BOUAZZA



[1] Du Gardien, du Conservateur, d’Allaah.
[2] Cinq garçons et trois filles.
[3] De son premier mariage, mon père a eu mon frère aîné et ma soeur décédée en 1970 (selon le calendrier dit grégorien).
Il a eu  trois filles et deux garçons avec ma mère, sa deuxième épouse.
Avec une autre femme, il a eu un garçon.
Et d’un dernier mariage, il a eu  une fille et un garçon.
[4] Le ʺrʺ roulé.
[5] La Maison Blanche, Casablanca.
[6] 25 safar1438 (le ʺrʺ roulé).
[7] Le témoignage qu’il n’y a d’Ilaah (Divinité) qu’Allaah et que Mohammad est le Messager d’Allaah.
[8] Allaah ne pardonne pas qu’on Lui associe quoi que ce soit et pardonne le reste à qui Il veut.
Alqoraane (Le Coran), sourate 4 (chapitre 4), Anniçaa-e, Les Femmes, aayate 48 (verset 48).
[9] Khémisset.
[10] Je n’avais pas encore vingt ans.
[11] Je connais peu, beaucoup de mes frères et soeurs.
Je fais partie, comme j’ai eu plusieurs fois l’occasion de l’écrire, d’une famille décomposée.
[12] Plus tard, il a changé, et n’avait plus grand-chose à voir avec ce qu’il était.
[13] Alqoraane (Le Coran), sourate2 (chapitre 2), Albaqara (le ″r″ roulé), La Vache, aayate 156 (verset 156).
Dans sa traduction du Qoraane (le ʺrʺ roulé) Kachriid (le ʺrʺ roulé)  note que ʺla formule de consolation citée dans le verset 156, s’appelle ʺistirjaa’eʺ (le ʺrʺ roulé).
Celui qui la prononce avec sincérité et conviction y trouve en effet une réelle consolation dans les moments les plus difficiles.
Quand on se rappelle qu’on est entièrement la propriété d’Allaah et que c’est vers Lui que doit se faire notre retour, comment peut-on être écrasé de chagrin devant la perte des biens éphémères de ce monde ? Quand Allaah nous reprend un être cher ou un bien auquel nous sommes attachés, Allaah n’a fait que récupérer ce qu’il nous a prêté par pure bonté de Sa part et sans aucune contrepartie de la nôtre.
Que pouvons-nous donner à Celui qui possède toute chose en exclusivité totale ?ʺ
Salaah Addiine Kachriid (Salah Eddine Kechrid), traduction du Qoraane (Coran), Loubnaane (Liban), Bayroute (Beyrouth), éditions Daar Algharb Alislaamii, cinquième édition, 1410 (1990), première édition, 1404 (1984).
Note en bas de la page 30.
Voir :
http://deshommesetdesfemmes.blogspot.com

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