Autrefois,
il y a de cela des dizaines d’années,[1] nos
jeux d’enfants dans le quartier étaient entrecoupés par des courses chez
l’épicier, chez le marchand de légumes et de fruits et au four public[2] pour
déposer le pain à faire cuire et aller le prendre avant l’heure du repas.
Mais
même pour faire les courses, nous nous amusions à n’en plus finir.
De
temps à autre, pendant les jeux, nous apercevions une petite fille sur un âne,
guidé par une servante, sillonnant le quartier.
C’était
la fille d’une française qui a épousé un médecin marocain.
J’ai
appris plus tard que le médecin, une relation de mon père, tenait à faire
goûter à sa fille les joies des randonnées à dos d’âne, en pleine « ville
nouvelle »[3] de Mknaas,[4]
marquant ainsi son profond attachement à ce qu’il appelait sa
« berbéritude ».[5]
Aujourd’hui,
il est mort.
J’ignore
ce qu’est devenue sa fille, ni s’il a eu des petits-enfants.
Des
arrières petits-enfants ?
Suite
à une décision de lundi 10 juin 2019,[6] ses
arrières petits-enfants, s’ils existent, et d’autres enfants, s’ils sont
scolarisés,peuvent étudier la langue amazigh[7] qui
sera enseignée dans les écoles.[8]
BOUAZZA
[1] J’avais treize ans.
[3] Les
villas à ″hmria″ (le ″r″ roulé), réservées aux colonialistes
français regroupés en ″ville
nouvelle″, commençaient à être
occupées par plus de marocains qu'avant ce qui a été appelé ″l’indépendance dans
l’interdépendance″, statut
octroyé par le système colonialo-impérialo-sioniste, et qui s’est traduit dans
les colonies par la multiplication des "États" supplétifs,
subordonnés avec plus ou moins de zèle, de soumission et de servilité dans
l’exécution des ordres des métropoles et autres employeurs.
Ces
"États", toujours en place
en Afrique et ailleurs, sont fondés sur l’imposture, le crime, la trahison, la
tromperie, la corruption, l’injustice, la perversion, la débauche, le mensonge,
le pillage, l’oppression, l’exploitation, le viol, la tyrannie, la torture,
l’enfermement, la négation de l’être humain.
Au
Maroc, colonie française dite ″protectorat″, le sultan, protégé est ainsi
devenu roi au service du système colonialo-impérialo-sioniste.
Les
gens de l’ancienne ville (lmdina, la médina)
appelaient ces marocains installés à la place des colonialistes
français, ″nçaaraa jdaad″ (le "r" roulé), pluriel de
"nçraanii", nazaréen, chrétien, non-musulman, français.
[4] Meknès.
[5] Je ne fais que reprendre
ce dont j’ai déjà parlé.
[6] Selon le calendrier dit
grégorien.
[7] La langue berbère.
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