samedi 11 mars 2017

C’EST TOUT

«Pendant dix-huit ans, des hommes ont vécu enfermés chacun dans une cellule, sans lumière aucune, ni lampe ni fenêtre. Dix-huit ans dans l’obscurité. [...]. Chaque homme y était seul, mais pouvait entendre les autres parler, gémir, agoniser, délirer et mourir. [...].
Pendant dix-huit ans, ces hommes ont vécu dans des cellules de trois mètres quatre-vingt-dix de long et deux mètres de large, avec pour seul univers une dalle de ciment en guise de lit, perchée à soixante-quinze centimètres de hauteur et large d’un mètre, deux couvertures, une assiette, un broc, un verre, un trou sans eau en guise de toilettes, des vêtements en loques, pas de chaussures pour la plupart. [...].
Pendant dix-huit ans, ces hommes n’ont vu âme qui vive en dehors des gardiens – des militaires des forces armées royales – et, bien entendu, n’ont eu de visite ni d’avocat, ni de médecin, ni d’infirmier. [...].
Pendant dix-huit ans, ceux qui ont survécu[1] ont ainsi supporté l’insupportable [...].»
Vers la fin du livre, parlant d’un survivant, l’enseignante qui a écrit ces lignes rapporte en parlant de l’un des bagnards :
«Il récite le Coran[2] tout le temps ; il ne sait plus bien où il était ni où il est : il est avec Dieu[3], qui l’a sauvé, c’est tout.»[4]



[1] Dans ce bagne et dans d’autres mis en place par le régime de l’imposture qui continue de sevir au Maroc, des vers se nourrissent des corps de bagnards qui ne sont pas encore décédés.
[2] Alqoraane (le ʺrʺ roulé).
[3] Allaah.
[4] Christine Daure-Serfaty, Tazmamart, une prison de la mort au Maroc, Paris, Stock, 1992, P. 11, 12, 13, 14, 15.et 194.
J’ai déjà cité ce texte.

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