lundi 19 juin 2017

BELLE-ÎLE-EN-MER


Les détenus mineurs sont séparés des détenus majeurs,[1] mais des échanges existent.
Un détenu majeur a pu me passer des textes sur la délinquance juvénile.
Des textes concernant des périodes à Belle-Ile-en-Mer.[2]
J’en ai beaucoup parlé avec l’éducateur en détention …
Je lis :
« Le bateau pour la traversée est prévu pour 15h 20.
J’attends avec d’autres.
Sur le bateau, je pense aux enfants qui, quelques années auparavant, embarquaient à ce même endroit, pour être enfermés dans le camp de redressement de la colonie pénitentiaire de Belle-Ile-en-Mer.
La traversée dure environ 45 minutes.
Malgré le calme de la mer, je suis agité.
Comment étaient ces enfants ?
Etaient-ils assis sur un banc comme moi ?
Etaient-ils entassés dans la cale du bateau ?
À quoi pensaient-ils ?
À leur famille ?
À leur quartier ?
À leur région ?
À leurs camarades ?
À la loi qu’ils ont transgressée ?
Nous arrivons à Belle-Ile.
Beaucoup de personnes attendent.
Ces enfants étaient-ils attendus ?
Par qui ?
Des policiers ?
Des surveillants ?
Des éducateurs ? »
Je lis encore :
« Cette île – comme d’autres lieux magnifiques – a servi de lieu de déportation non seulement d’enfants jugés très dangereux…mais aussi de résistants d’Afrique – dits terroristes – contre le colonialisme …
Je marche sans les oublier …
Je me mêle, avec d’autres, aux divers éléments qui nous transportent loin …
Le ciel et la mer se rencontrent, font jaillir d’autres images, d’autres couleurs, d’autres sons, d’autres formes, d’autres mouvements et procurent d’autres sensations …
Depuis combien de temps marchons-nous ?
Quelle distance avons-nous parcouru ?
Cela n’a pas d’importance.
Nous marchons et je sens le souffle qui est en nous.
Le souffle des enfants qui naissent semble être l’écho de notre souffle …
Ce qui doit être, sera …
Cette Marche a commencé depuis longtemps déjà …
Elle continue …
Nous marchons au milieu de la multitude, venue de tous les horizons … sur le chemin de la MÉMOIRE
Nous nous souvenons de DEMAIN ».
Avec l’éducateur en détention, j’ai appris qu’au temps des colonies pénitentiaires, les mineurs délinquants étaient souvent considérés comme une terrible menace et subissaient un traitement qui entretenait l’exclusion.
Il a souligné que l’image des mineurs délinquants n’a pas beaucoup changé depuis, en ajoutant qu’elle est même très mauvaise pour ce qui concerne les mineurs délinquants incarcérés qui sont, pour la plupart liés au processus migratoire des populations d’Afrique surtout, populations dites musulmanes …
Pour ceux-là – et pour d’autres aussi – les amalgames et les représentations convenues cultivent et entretiennent le mépris, les discriminations dans de multiples domaines …
Cela je le sais.
Je l’ai toujours su …
Il y a beaucoup à faire, surtout dans les prisons et autres lieux d’enfermement des mineurs et des majeurs, pour essayer d’expliquer, par ce qui est accessible à tout un chacun, une approche AUTRE … pour diminuer l’incompréhension que d’aucuns entretiennent par des agissements et une phraséologie propres à des êtres qui ont du mal à cerner l’Essentiel …
Ces êtres sont inaptes à percevoir que la cécité n’atteint pas les yeux, mais les cœurs.
RAPPELLE, car le RAPPEL est utile aux êtres qui croient …
Qui veulent comprendre le Sens, saisir le Lien.[3]
  
BOUAZZA



Belle-Île-en-Mer.
Peinture réalisée par mon épouse.
[1] Dans les prisons en France.
[2] Île en Bretagne.
[3] Texte mis sur le net, sans l’illustration, le 26 juin 2004 selon le calendrier dit grégorien, sous le titre ʺRappelleʺ, à partir d’écrits antérieurs.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire