Lors
du dernier parloir, j’ai eu en plus du linge, une petite publication dont je
connais maintenant certains passages par cœur.
À
force de les raconter à d’autres mineurs délinquants incarcérés, nous avons
fini par considérer des personnages comme faisant partie de nos familles.
« Mohammad
apprécie beaucoup les voyages qu’il effectue parfois dans divers pays.
À
chaque voyage, il est émerveillé de se sentir partout, quelles que soient les
vicissitudes du temps et de l’espace, plein de sérénité.
La
grande facilité qu’il a de s’adapter où qu’il soit, tout en restant ce qu’il
est, le remplit de bonheur.
Il
est reconnaissant pour cet immense bienfait qui lui est généreusement offert.
Il
ne s’inquiète jamais pour son épouse France et leurs filles Mariame et Balqis,
lorsqu’il lui arrive de voyager sans elles.
Il
sait, et il le sait de source sûre, qu’elles sont comme lui, imperméables aux
assauts de l’inquiétude.
En
regagnant l’appartement, il a été accueilli dès le seuil par sa femme et ses
filles, débordantes de tendresse.
Il
prit son épouse dans ses bras et la couvrit de baisers.
Ses
yeux parlent au cœur et à l’esprit.
Sa
peau couleur de miel se marie parfaitement avec sa douceur.
Son
visage, sa façon d’accompagner sa parole de gestes lents, son sourire, l’éclat
de ses dents, son corps lui donnent une grâce toute particulière.
Elle
est toujours comme il n’a jamais cessé de la voir.
Eblouissante.
Belle
comme les univers.
Cette
fois encore, il n’a pas attendu longtemps pour lui tendre un flacon de parfum.
Celui
qu’elle préfère.
Elle
aime les parfums.
Elle
l’ouvre, ferme les yeux, passe un moment à sentir et semble vivre un moment de
recueillement, une invocation …
Dans
le salon, Mohammad s’est assis devant France qui tournant le dos au balcon, lui
paraît ainsi debout sur fond de ciel rouge la mettant encore plus en relief.
Les
sonorités de l’animation extérieure lui parvenaient faiblement, puis de plus en
plus lointaines jusqu’à disparaître complètement.
Et,
comme par enchantement, certaines images des années passées avec France
commencèrent à défiler …
Il
se voyait dans une course derrière elle, au début de leur mariage, à travers un
champ fleuri. Le rire de France se confondait avec le chant des oiseaux et
répandait une musique qui, avec les parfums de la nature, procurait des
sensations exquises.
Le
soleil semblait ravi de ce moment en brillant de tout son éclat et en tournant
autour de France et de Mohammad qui finirent par se rejoindre.
Et
il s’est passé ce qui se passe de plus fabuleux entre un mari et son épouse.
Deux
êtres se répandant l’un dans l’autre, se complétant l’un par l’autre par ce
signe fantastique qu’est l’harmonie dont témoignent aussi le ciel, le soleil,
la lune, les étoiles, le vent, les mers, les cours d’eau, la terre, les saisons,
les animaux et d’innombrables autres créatures …
- Je
suis un champ.
En
moi germe de nouveau la semence.
Lorsque
France s’est penchée et lui a chuchoté cette phrase, il s’est passé ceci :
À
l’instant même qui suivit le chuchotement, Mohammad était debout, avec dans ses
bras, son épouse et leurs filles.
Chaque
grossesse, chaque naissance ancre en eux plus profondément la joie devant ce
cycle fabuleux, cette voie du destin de chaque être et donc de l’enfant – qui
n’appartient ni à la mère ni au père – qui doit accomplir ce pourquoi il a été
créé … ».[1]
BOUAZZA
[1] Texte
mis sur le net le 24 avril 2004, selon le calendrier dit grégorien, à partir
d’écrits antérieurs.
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