Parmi
les mineurs délinquants incarcérés, ou laissés en liberté, concernés par des
décisions judiciaires, certains ont quelques difficultés dans l’usage courant
de la langue française.
Les
parents parfois ne parlent pas cette langue.
Il
arrive à l’éducateur en détention de parler à quelques-uns, en cas de besoin,
ainsi qu’à des parents, la langue du pays d’origine.[1]
Levée
de boucliers.
Représentations.
Clichés.
Une
violence inouïe, ancrée depuis des lustres, qui tente de se cacher derrière des
mots « enveloppés » … des « non-dits » …
Une
haine immense, insidieuse, véhiculée de longue date par ceux et celles qui ne
connaissent rien de cette langue … en dépit de la « proximité » …
Un
mépris profond qui prend le masque de « l’argumentation
rationnelle » : l’éducateur auprès des mineurs fait partie d’une
institution dans laquelle il doit être « neutre ».
Pour
ce faire, il n’a pas à user de la langue de leur pays d’origine et de celui de
leurs parents … car il risque de perdre sa « neutralité » …
Cette
manière « d’ouvrir » le « débat » par une fermeture, n’est
pas seulement une gabegie de plus, c’est une agression caractérisée, devenue
ordinaire …
L’éducateur
en détention a déjà connu des situations de ce genre, où une peur ancestrale,
obscurantiste, dont personne ne tient à analyser les causes réelles, provoque
des réactions « hystériques » …
À
chaque fois, il a dénoncé l’« état d’esprit » qui continue, en dépit
des discours des démagogues de tous bords, pires en réalité que des armes de
destruction massive, à vouloir vendre, sous d’autres emballages,
« l’histoire de nos ancêtres les gaulois » et autres horreurs qui
n’ont pas disparu avec la fin des empires coloniaux et qui sont entretenues et
alimentées par l’impérialisme et, consciemment ou pas, par toutes ses
créatures.
C’est
une partie d’un ensemble par lequel certains et certaines excluent ipso
facto « l’autre », parce qu’il leur résiste et veulent le réduire
à quelque chose qui ne doit exister que par rapport à la hiérarchie de normes
qu’ils s’accordent le droit de lui imposer, pour le couper, qu’ils le sachent
ou pas, de ses racines, de son identité, de sa mémoire et le détruire …
Ces
gens-là cherchent à effacer même les mots qui peuvent garder un sens pour
« l’autre » dans son parcours, dans son histoire.
Ils
se rabattent, y compris sur le « verlan », pour dénaturer en fait des
mots et les vider de leur contenu …
Ces
gens-là sont un lourd problème.
Très
lourd.
Ils
ont énormément à faire s’ils veulent, un jour, « voir » les mineurs
et leurs parents.
Que
leur faut-il pour les « percevoir » ?
Ils
ne se le demandent même pas, préoccupés qu’ils sont par leur nombril …
La
cécité n’atteint pas les yeux, mais les cœurs …
Les
cœurs de ces gens-là sont aveugles.
Un
tel constat a des causes et des conséquences bien sûr.
L’éducateur
en détention, avec humilité, fait des efforts pour essayer de les étudier, d’en
tirer des enseignements et d’approfondir la réflexion sur le Sens et le Lien …
Tout
reste à décoloniser.
Décoloniser
« les ducs à tiffes »[2] n’est
pas le plus simple …
Avec
les mineurs délinquants incarcérés et leurs parents, comme avec d’autres,
l’éducateur en détention continue d’avoir recours à la langue du pays d’origine
en cas de besoin …
« Quand
j’écris en français, ma langue « maternelle » se met en
retrait : elle s’écrase […] Mais elle revient (comme on dit).
La
mère, la terre, la loi voilée.
Et
je travaille aussi à la faire revenir quand elle me manque ».[3]
BOUAZZA
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